Que signifie la transition écologique locale ?

C’est vrai ça, sur ce blog, ce terme est utilisé à outrance, dans chaque article, pour ne pas dire dans chaque paragraphe, comme un étendard brandi vaille que vaille, jusqu’à l’écoeurement du lecteur. Mais peut être ignorez vous ce que recouvre ce concept, ou plutôt avez des préjugés sur sa signification réelle. Qu’est ce que la transition écologique locale ? Qu’est ce que la résilience ? Pourquoi en avons-nous besoin ?

L’urgence climatique…

Si vous lisez ceci, il n’est manifestement pas nécessaire de vous refaire tout le topo sur le réchauffement climatique et les dérèglements climatiques que cela induit. Néanmoins, il n’est pas inutile de faire quelques rappels sur ce qui nous attend à l’horizon 2050, voire 2100 pour les plus jeunes d’entre nous.

Chaque année, la concentration en CO2 dans l’atmosphère augmente d’environ 3 parties par million. Nous sommes officiellement à 416ppm début 2020 (0.0416% de l’atmosphère terrestre), soit un réchauffement de +1.1°, le tout sans considérer les autres gaz à effets de serre (méthane, protoxyde d’azote, etc.). Avec moins de 300ppm en 1800, à l’aube de la révolution industrielle, nous pourrions atteindre les 500 en 2050, ce qui nous ferait atteindre les +2° de réchauffement.

Concrètement, cela signifie avant tout pour nous européens une perturbation des phénomènes météorologiques, que nous commençons déjà à entrevoir. Des étés plus chaud, des hivers doux, mais aussi des tempêtes plus fréquentes, et autres épisodes extrêmes. En 2050, Météo France estimait que la température pourrait atteindre 45° dans toute la France, avec des pics à 50° dans l’est et le sud. A savoir que l’augmentation de la température a des effets exponentiels, chaque dixième en plus accroit considérablement les risques de perturbation supplémentaires.

De nombreuses conséquences ont déjà lieu en ce moment avec des conséquences catastrophiques

  • acidification des océans, qui absorbent trop de CO2, ce qui diminue les populations de planctons, et donc celles des poissons en général. Arrivé à un certain stade, les océans ne pourront plus stocker de CO2…et commenceront à les relâcher.
  • perte de productivité agricole et baisse de la capacité de croissance des végétaux en général, car adaptés à un certain niveau des températures, ils n’ont pas le temps de s’adapter à la hausse actuelle.
  • fonte du permafrost, cette couche terrestre gelée qui retient des quantités massives de méthane
  • perturbation de la circulation océanique suite à la fonte des pôles, ce qui pourrait entrainer une hausse de la fréquence du phénomène El nino et un affaiblissement du Gulf Stream
  • stress hydrique avec des impacts sur l’agriculture, le refroidissement des centrales énergétiques, la production industrielle, la consommation individuelle.
  • etc.

En tout état de cause, nous risquons de connaître tout cela d’ici 2050, ce qui ne manquerait pas de provoquer une crise globale qui, outre l’aspect environnemental, risquerait également d’être démocratique, financière, économique, énergétique, alimentaire et sanitaire.

Impose la résilience…

Pour prévenir cette série de risques, s’y adapter, voire les surmonter, nos territoires doivent non seulement baisser leurs émissions de gaz à effets de serre, mais également se préparer au pire, nous devons développer la résilience de nos communes.

La résilience est un concept polyvalent, qui dans le cadre d’une communauté humaine, désigne sa capacité à continuer à fonctionner, voire à croître, après une catastrophe.

Et des catastrophes, nous risquons d’en connaitre.

  • La difficulté croissante à extraire des hydrocarbures – le pic de pétrole standard ayant été atteint en 2008 – qui se traduit par un retour sur investissement de plus en plus faible (il faut 1 baril de pétrole pour en extraire 12, contre 100 en 1900), risque de plonger l’humanité dans une crise énergétique majeure. Or, sans énergie, c’est notre capacité à échanger des marchandises qui est menacée, qu’il s’agisse de produits alimentaires, de minerai, de pièces détachées ou de produits finis.
  • Or, la baisse des rendements agricoles dans un contexte de fort accroissement de la population (nous gagnons un milliard d’habitants par décennie) est susceptible de causer des famines.
  • Des famines qui pousseront des populations entières à émigrer, là où elles pourront être nourries, sans espoir de retour.
  • Et ce dans un contexte où, par pénurie de matériaux (dont les stocks diminuent de plus en plus) et d’énergie, le système économique et financier risque de s’effondrer, le chômage sera en forte hausse et les recettes fiscales diminueront drastiquement, les rendant incapables de faire jouer la solidarité nationale.
  • La tentation de l’autoritarisme sera forte, des groupes armés pourraient se mettre en place pour défendre leurs richesses, leur territoire mieux adapté que d’autres, déterminer qui a le droit d’y vivre ou non, et l’état de droit pourrait disparaitre dans certaines zones abandonnées par l’état.
  • Pendant ce temps, les conditions météorologiques se détraqueront de plus en plus, et tant les végétaux que les animaux continueront à voir leur population décliner, aggravant ainsi la pénurie en nourriture et en matériaux.

C’est pourquoi, sans anticipation, nos villes risquent bien elle aussi de vivre ce que certains appellent déjà l’effondrement et qui ne peut être évitée ou en tout cas atténué que par leur transformations en villes résilientes. aptes à surmonter ces crises

Dans cette acception, elle doit clairement être différenciée de l’autarcie et de l’autonomie. La première désigne la capacité d’une communauté à vivre repliée sur elle même, tandis que la seconde désigne sa capacité à continuer à fonctionner jusqu’à épuisement de ses ressources. Les amishs tentent de vivre en autarcie, produisant eux-même tout ce dont ils ont besoin, ce qu’ils ne pourraient faire en acceptant de dépasser leur niveau technique actuel. Un bunker de guerre atomique est conçu pour abriter ses occupants pendant quelques années, c’est son autonomie. Au-delà de cette période, il ne peut plus fonctionner.

A l’inverse, une communauté résiliente ne vit pas repliée sur elle-même, et peut chercher des échanges avec d’autres communautés, mais n’en a pas forcément besoin pour survivre. Elle produit ce dont elle a besoin pour survivre, de manière à maintenir les fonctions de base de ses membres, et cherche même à produire plus pour pouvoir échanger avec d’autres communautés.

De la sorte, si la situation venait à s’améliorer, l’ampleur des crises à s’atténuer, ces communautés résilientes seraient prêtes à remettre en place un fonctionnement normal des institutions.

Pour parvenir à une transformation rapide de nos modes de vie…

Mais pour y parvenir avant qu’il ne soit trop tard, il faut s’y mettre dès maintenant. Et c’est là que le concept de transition montre ses limites, puisqu’il suppose un changement progressif et indolore, une adaptation tout au long d’une génération.

Cela ne suffit plus. Quand il a élaboré ce concept en 2005, Rob Hopkins imaginait un processus qui prendrait 20 ou 30 ans. Sauf qu’aucun effort n’a été entrepris. Pire, entre 2000 et 2020, les émissions de CO2 dans le monde ont bondi de 50%.

Nous n’avons plus le temps d’une transition. Au vu du budget carbone restant pour la France, considérant les besoins des pays sous-développés nécessitant une adaptation au changement climatique, il nous resterait tout au plus dix ans d’émissions carbones pour atteindre la neutralité carbone et ainsi espérer rester en dessous des +2°. Si nous ne visons pas la neutralité carbone d’ici là, condamnant ainsi la Terre à un réchauffement considérable, nous ne réussirons peut être pas à adapter suffisamment nos sociétés pour maintenir nos modes de vie à un standard minimum acceptable.

C’est pourquoi certains parlent de passer à une économie de guerre comparable à celle qui s’était mise en place pendant la seconde guerre mondiale et qui avait permis, en quelques mois, de reconvertir les lignes industrielles en lignes de production d’armement. Le rationnement en serait la suite logique, permettant d’habituer la population à une baisse de son empreinte carbone à travers une restriction de sa consommation de biens et services.

Et ainsi concrétiser la transition écologique et locale !

Car de fait, nous n’aurons pas le choix. Si la solution n’est pas technologique (spoiler : elle ne l’est pas) et que les prédictions sur les points de bascule ne sont pas erronées, tout pourrait réellement changer en l’espace d’une génération si nous ne changeons pas radicalement nos modes de vie.

La transformation rapide de notre civilisation thermo-industrielle vers des sociétés engagées dans une transition écologique et locale est une condition de survie.

Et ce faisant, nous aurons même le luxe de pouvoir choisir à quoi pourra ressembler cette société résiliente, quelle sera sa gouvernance, quelles espèces végétales et animales nous pourrons tenter de sauvegarder, quelles relations nous voulons maintenir entre les individus, quelles activités doivent perdurer sur nos territoires, quelles formes doivent avoir nos villes, et ainsi de suite.

There Is No Alternative

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