Installer des ateliers de réparation vélo

Est-il encore besoin d’insister sur la nécessité de favoriser le vélo et les mobilités douces en général dans l’aménagement des villes en transition écologique ? Pourtant, pour faciliter l’adoption du vélo, la ville doit développer des infrastructures adaptées. Installer un atelier de réparation vélo est indispensable pour y parvenir.

La nécessité de soutenir l’usage du vélo

Le vélo tient une place prépondérante dans la stratégie de réduction des émissions de GES et de polluants atmosphériques. Peu cher, flexible, relativement rapide, ne consommant pas d’énergie, il permet de parcourir des distances moyennes à moindres frais. Le vélo est même plus rapide que la voiture en ville. Or, considérant que la voiture reste reine pour les trajets inférieurs à 1 kilomètre, il devient primordial de lever les freins à l’usage du vélo.

Cet usage sera d’autant plus efficace que la ville se recentrera sur elle même. En effet, moins une ville s’étale, plus elle concentre à proximité les uns des autres commerces, bureaux et domiciles. Cette proximité profite aux déplacements doux et permet d’envisager un retour du vélo.

Les freins à l’usage du vélo

Les études menées par l’Insee montrent qu’un français sur deux possède un vélo. Mais ils sont à peine 10% à l’utiliser régulièrement. Une différence qui peut s’expliquer par de nombreux facteurs.

Pour aller au travail jusqu’à 4 kilomètres, le vélo n’est utilisé que par 5% des français (60% prennent la voiture). La Fédération des Usagers de la Bicyclette dans ses rapports biennaux, souligne bien les freins pouvant expliquer ce résultat. Une partie d’entre eux relèvent de l’urbanisme et ne seront pas traités ici. Pour le reste, il s’agit du manque de praticité du vélo pour la vie quotidienne, ou d’un moyen de déplacement pas assez rapide, ainsi que de la peur de se faire voler son vélo.

Pour le manque de praticité, la solution pourrait être la location de remorque ou de vélo cargo, pratique pour les courses, le transport des enfants ou le transport d’encombrants vers la déchetterie, l’achat de meubles. De même, à défaut d’un véritable vélociste, la mairie pourrait acquérir par commande groupée des accessoires vélo pour mieux les diffuser au sein de la population. Par exemple, la peur du vol est un puissant frein au vélo. Or, l’acquisition à prix réduit de chaines pliantes de type abus (quasi inviolables) pourrait rassurer et donc faciliter le passage à l’acte.

Enfin, pour aller plus vite, outre l’achat d’un VAE, il faut savoir entretenir et réparer son vélo. Les tutoriels youtube ne sont pas forcément clairs, et il faut un minimum de matériel. Un vélo bien entretenu, avec des pièces neuves, peut facilement augmenter de 50% sa vitesse moyenne sans effort supplémentaire. C’est donc un moyen évident d’augmenter la distance à parcourir ou de réduire le temps passé. Mais pour ce faire, il faut savoir où aller. Je vous propose donc de passer à la section suivante.

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Mettre en place un atelier municipal de réparation vélo

Pour parvenir à lever les freins qui ne sont pas liés à l’organisation de la ville, je vous propose donc de créer un atelier municipal de réparation vélo. Evidemment, cela ne sera possible que s’il n’existe pas suffisamment de vélocistes chez vous, comme nous allons le voir ci-après. D’ailleurs, la location de remorques ou la vente d’accessoires à bas prix pourraient aussi y prendre place.

Le cadre légal flou de l’activité économique des mairies

Une jurisprudence abondante est venu préciser la possibilité pour une collectivité d’exploiter un service public commercial. Depuis l’arrêt du conseil d’état du 30 mai 1930 (chambre syndicale du commerce de détail de Nevers) jusqu’à celui du 31 mai 2006 ( Ordre des avocats au barreau de Paris ), ces conditions étaient plutôt restrictives. En effet, outre un critère de compétence légale, il fallait une carence de l’initiative privée et un réel besoin pour fonder une utilité publique à même de justifier une intervention publique.

Pourtant, le conseil d’état a apporté une certaine flexibilité dans l’interprétation du besoin et de la carence. Ainsi, un service public commercial peut être créé en complément d’une activité réellement nécessaire, ou pour équilibrer les finances d’un service public (comme vendre des glaces dans un théâtre), voire pour satisfaire un besoin interne. En outre, si la collectivité ne fausse pas la libre concurrence par le financement de cette activité, cette restriction devient inopérante. Et la jurisprudence communautaire va plus loin. En effet, elle ne différencie pas les acteurs privés et publics tant qu’ils respectent les règles de la libre concurrence.

Par ailleurs, cette carence est définie plus précisément dans la loi pour les communes rurales ou les quartiers prioritaires. Il peut s’agir soit d’une absence d’offre privée ou d’une offre insuffisante à satisfaire la demande. Néanmoins, il reste compliqué pour une commune de s’y retrouver. Ou plutôt, il peut paraître compliqué de justifier la création d’un atelier vélo en tant qu’établissement public.

La solution d’une mise à disposition de l’atelier technique

De nombreux services municipaux offrent des prestations à destination du public tout en servant aux besoins internes de la commune. Par exemple les bibliothèques fournissent les écoles en livres d’étude mais aussi les habitants. Les services animations jeunesse vendent des séjours en colonie de vacances ou des stages d’activité. Il est aussi possible de louer du matériel communal, comme un camion ou une broyeuse.

Ce cadre est plus sécurisant pour offrir une prestation comme un atelier de réparation vélo. Plutôt que d’avoir une structure juridique autonome, il fonctionne sur le principe des régies de recettes. C’est à dire que des agents sont nommés pour encaisser de l’argent contre l’obtention d’un service ou d’un bien.

De ce fait, l’atelier technique municipal pourrait s’y prêter parfaitement. Pour peu que votre commune dispose d’un garage avec son mécanicien, il pourrait s’occuper aussi de réparer les vélos des habitants. Et même s’il ne répare pas lui même, un espace pourrait être aménagé pour un atelier d’auto-réparation. Ce qui permettrait de profiter des outils présents, ainsi que des conseils du mécanicien, pour devenir ainsi autonome dans l’entretien de sa monture et prendre confiance en soi.

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Le soutien à une association vélo

La troisième possibilité en la matière est d’aider une association à ouvrir elle même son propre local. Cela peut passer par la mise à disposition à titre gracieux, mais de préférence à bas prix, d’un local adapté. Ce soutien pourra aussi prendre la forme de subventions pour le fonctionnement d’une activité par nature peu rentable.

Certaines intercommunalités soutiennent aussi ces ateliers en les laissant récupérer les vélos abandonnés en déchetterie. Ainsi, ils réparent les vélos encore en bon état, et sinon récupèrent les pièces détachées exploitables, vendant le reste à un ferrailleur.

Le risque en la matière est de se rapprocher d’une gestion de fait. Pour cette raison, le soutien devra rester raisonnable. L’atelier devra trouver sa subsistance dans les services rendus aux cyclistes. En outre, ce faisant, vous perdez le bénéfice d’un agent public mécanicien, dont une partie du salaire serait payée par les réparations.

Pourtant, cette solution est avantageuse pour l’animation d’une communauté locale de cycliste. Une telle structure associative sera contrainte de mobiliser la population pour subsister et contribuera donc au retour de la pratique du vélo dans les déplacements quotidiens.

Je vous invite à découvrir par ailleurs le réseau des atelier d’auto-réparation pour découvrir laquelle pourrait vous aider près de votre commune.

Conclusion

Comme nous avons pu le voir, il est tout à fait possible pour une commune de mettre en place une politique vélo. Cela peut se faire aisément dans un premier temps par la mise en place d’un atelier de réparation vélo, grâce auquel vous pourrez lever d’un coup plusieurs freins à la pratique du vélo.

Financièrement, ceci peut se faire pour un coût assez restreint au vu des bénéfices que l’on peut en espérer. Si vous choisissez l’option régie municipale, votre mécanicien sera amorti par les recettes des réparations et le coût moindre par rapport à un garage privé. Pour le soutien à une association, la mise à disposition d’un local ou la subvention de fonctionnement devrait vous revenir de dix à 20 000 euros maximum. Ce qui devrait constituer une mise de départ, puisque l’activité devrait vite se développer avec l’accroissement prévisible de la pratique du vélo.

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Nicolas Falempin

Cadre de la fonction publique territoriale spécialisé en protection de l'environnement.  Mélange droit public, transition écologique et tasses de café pour créer un blog concret sur la transition des territoires.

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