Diagnostiquer le foncier et initier la résilience alimentaire

La disparition des terres et la perte du sens du travail agricole ne sont pas deux logiques inévitables. La première tâche de l’élu désireux de mettre en place une nouvelle politique agricole locale est de repérer les atouts et opportunités à sa disposition : surface agricole exploitées et exploitables, types de culture, richesse des sols, mais aussi structure sociologique de la population agricole, besoins de la population, liens entre l’agriculture locale et les commerces de proximités, etc. des étapes indispensables pour initier une nécessaire résilience alimentaire face aux défis à venir.

Initier sa résilience alimentaire

Il vous faudra ainsi initier un diagnostic les agriculteurs eux-même, mais aussi la Safer et la chambre départementale d’agriculture. D’autres acteurs peuvent s’ajouter comme les habitants, les commerces alimentaires, et tous les acteurs qui se sentent concernés. L’acquisition sera d’autant plus facile que votre initiative est portée par les habitants de la communes.

Votre premier objectif devrait être de sanctuariser les terres existantes, de manière à ne plus artificialiser de terres fertiles (cf la partie consacrée à l’urbanisme). En effet, en inscrivant cette protection dans le PLU (notamment en les plaçant en zones réservées afin de pouvoir les préempter), voire en mettant en place des zones agricoles protégées ou – en collaboration avec le département – des  périmètres de protection des espaces agricoles et naturels périurbains, qui gèleront la construction et rendront difficile tout changement d’affectation de ces terres.

En lien avec les agriculteurs, il s’agira de repérer les futurs départs à la retraite, ceux qui souhaitent céder du terrain pour les sensibiliser à la cession du terrain à la commune, en leur expliquant la démarche. Le repérage du terrain peut concerner aussi des zones urbaines ou périurbaines, même bâties mais disposant de terrain (dents creuses, grands jardins, entrepôts désaffectés, etc.)

Soutenir l’installation

Il s’agit également de considérer les friches en distinguant celles exploitables et celles refuge de biodiversité. La collectivité sera en effet capable de supporter les coûts de dépollution et de régénération des sols, y compris durant la période de transition lors de sa remise en exploitation. Une période critique où, suite à une couche de terre trop mince ou trop pauvre en vie, les rendements seront trop faibles pour assurer des revenus suffisants aux producteurs qui s’y seraient installés. 

Avant de choisir la forme que prendra l’exploitation de ces terres (régie, affermage, location, etc.) ces terres peuvent éventuellement être préemptées par la SAFER ou un établissement public foncier local (ceux de l’état privilégiant avant tout la construction de logements), qui financera le stockage de ces terres en attendant que vous soyez en mesure de déployer votre programme alimentaire territorial. 

L’achat direct n’est pas la seule solution, et ce n’est en tout cas pas la plus économe en deniers publics. Vous pouvez également prospecter sur les jeunes agriculteurs désirant s’installer, notamment en agriculture biologique. Ce faisant, vous favorisez l’intermédiation et apporter des garanties au cessionnaire et en exonérant le repreneur de taxe foncière sur le non-bâti pour le soulager durant sa transition vers une production biologique. 

Il y a quelques jours, le média reporterre se faisait l’écho d’une initiative municipale inédite. Celle-ci repose sur un mécanisme permettant là encore à la mairie de se faire l’intermédiaire entre le propriétaire et l’agriculteur. La commune de Moëlan se base sur le code rural pour exiger aux propriétaires des terres en friche, non exploitées depuis plus de trois ans, de les exploiter eux même ou d’en confier l’exploitation à un agriculteur. Une démarche menée avec l’appui du département qui, en mettant sur pied une commission d’aménagement foncier, a pu distinguer les friches présentant un intérêt naturel et celles pouvant être remises en production. Et avec l’association Terre de Liens, l’installation de ces jeunes exploitants est facilitée sur le plan financier.

La mise en oeuvre d’une CAE est également un moyen pour alléger le travail des jeunes agriculteurs. Ainsi déchargés de la paperasse et ayant accès à un matériel mutualisé, ils pourront faire des économies.  Une Coopérative d’Usage du Matériel Agricole, dont ferait partie la municipalité, est également une autre option intéressante pour soutenir les jeunes agriculteurs.


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Nicolas Falempin

Cadre de la fonction publique territoriale spécialisé en protection de l'environnement.  Mélange droit public, transition écologique et tasses de café pour créer un blog concret sur la transition des territoires.

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