Interdire les déchets verts en déchetterie
J’imagine que vous n’avez jamais fait attention au flux de véhicules dans votre déchetterie. Récemment, des agents de déchetterie m’ont confié qu’en été, ils pouvaient voir 700 véhicules passer en une seule journée. Et évidemment, c’est avant tout pour se débarrasser des déchets verts, essentiellement les tontes de gazon et les tailles de haie. Ce qui est incompréhensible pour moi. Car non seulement il est facile de gérer ces déchets chez soi, s’embêter à aller les jeter ailleurs. Mais en plus, ils sont indispensables pour la bonne santé dudit jardin.
Sommaire de l'article
Quelques généralités sur les déchetteries.
C’est depuis le début des années 90 que nous construisons des déchetteries en France. La loi Royal de 1992 oblige en effet les communes à valoriser les déchets. Il faut donc collecter les déchets séparément et les recycler. C’est la fin des décharges, remplacées par des centres de tri et des incinérateurs. Ainsi, en 2014, il ne restait plus que 221 décharges contre environ 5000 déchetteries.
Or, en 2017, les français produisaient en moyenne 513kg de déchets par an. 195 kg (38%) étaient des déchets recyclables, dont 57 kg de déchets verts. Ce chiffre augmentera certainement naturellement en 2024 avec la collecte séparée des biodéchets, qui pourraient représenter jusqu’à 40kg par personne.Or, tant les biodéchets que les déchets verts pourraient être traitées directement à la maison ou en pied d’immeuble, sans collecte. Le faire est un gaspillage d’argent public et d’énergie fossile.
Car en déchetterie, les déchets verts représentent le plus grand nombre de rotation. Leur volume important remplit en effet vite les bennes. Et en haute saison, une benne de 40m3 ne suffit même pas pour une demi-journée. Dans les territoires ruraux, les beaux jours, vous pouvez être sûr que la benne est vidée quotidiennement.
Ces rotations incessantes sont un gaspillage. Un camion qui vient chercher la benne de déchets verts, l’amène chez un prestataire de compostage, qui s’en sert ensuite pour son compost, ça coûte 100€ à chaque fois. 100€ parce qu’il n’y a pas d’éducation à la gestion individuelle de ses déchets verts.
Réduire et réutiliser les déchets verts au jardin
Dans un premier temps, la meilleure manière de gérer ses déchets verts est de les réduire. Il est difficile de laisser pousser ses haies au-delà d’une certaine hauteur (c’est illégal). De même, un arbre – fruitier ou non – a besoin d’être taillé pour garder sa vigueur. Mais c’est différent pour la pelouse, qui peut ne pas être taillée.
Vous voyez déjà que je vais vous parler du compostage, sur lequel je m’étends dans un article dédié. Les déchets verts, mêlant pelouse, feuille morte et branchages broyés se prêtent facilement au compostage. Vous avez juste besoin de les étaler sur le sol, sur une couche de 10 à 20 cm, sur plusieurs m² si besoin, et de remuer régulièrement pour mélanger matière azotée (gazon frais) et carbonée (branchages, feuilles mortes). Et si vous arrivez à convaincre votre chien d’y faire ses besoins, cela améliorera encore plus la qualité du compost.
Ensuite, la pelouse, tondue en mulshing, est une solution idéale pour le jardin. Elle retient l’humidité, garantissant un gazon vert même en été. D’autre part, vous gagnez du temps en évitant la manutention des bacs et le transport jusqu’à la déchetterie. Éventuellement, si vous conservez le bac, cela pourra servir à pailler le potager.
En voyant ces options, vous comprenez déjà pourquoi les déchets verts n’ont pas leur place en déchetterie. Y aller vous fait perdre du temps, du carburant et vous permet de remplacer les engrais que vous utilisiez jusqu’alors.
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Les solutions de gestion collective des déchets verts
Evidemment, il n’est pas forcément aisé pour tout le monde de broyer ses déchets. Et c’est là où la commune – ou l’intercommunalité – peut avoir un rôle important. Elle peut en effet mettre en place un service de broyage pour les habitants. Il peut avoir plusieurs formes très différentes. Ce peut être un broyeur puissant à louer pour quelques heures ou jours. J’ai également vu un service de broyage réalisé dans une commune à dates fixes, pour que chacun y amène ses déchets verts. De surcroît, d’autres réalisent des broyages en déchetterie, soit en direct, soit en différé (ici, ce serait plutôt sur une place publique). Les modalités changent selon que l’on abonde un tas de déchets verts à broyer ou qu’on récupère ce qu’on apporte. Et si ce service peut être fait en prestation, je recommande quand même de l’internaliser. Ce sera moins cher, d’autant que c’est un service dont la fréquence d’usage peut vite grimper.
En effet, un ou deux agents communaux formés à l’usage du broyeur pourraient être mis à disposition de l’intercommunalité pour ces missions. Dans ce cadre, ils pourraient intervenir pour broyer les déchets directement ou former les personnes souhaitant louer l’engin. En complément, le maitre composteur communal ou intercommunal interviendrait pour apporter des conseils.
Dernièrement, il vous reste l’option de mettre en place un centre de compostage communal public. Il ne sera pas forcément aisé pour chacun de traiter ses propres biodéchets ou déchets verts, alors votre collectivité pourrait prévoir sa propre infrastructure. Cela servira d’ailleurs pour les professionnels, tant entreprises que paysagistes, qui n’ont pas forcément la capacité de traiter ces déchets chez eux.
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L’exemplarité des communes dans la gestion de leurs déchets verts
Enfin, pour amorcer un véritable changement des consciences, il faudra rendre votre mairie exemplaire. D’autant que la réduction de l’empreinte carbone individuelle passe aussi par celle des administrations publiques.
D’abord, en ce qui concerne la gestion des espaces verts. A priori, dans l’optique d’une résilience alimentaire locale, vous aurez reconverti la plupart des parterres et bacs en espaces de production. Espaces dont les résidus iront directement au composteur. Mais la gestion des zones herbeuses municipales devra passer aussi par la case mulching ou différenciation.
Ceci peut d’ailleurs s’appliquer à tous les domaines de la vie municipale. Par exemple, même les sapins de Noël pourraient connaitre un sort moins funeste que la déchetterie. Il en sera de même pour la gestion du cimetière, qui gagnerait à devenir rapidement zéro pesticide et déchets.
De la sorte, vos agents techniques se transformeront naturellement en ambassadeur de votre méthode. Premiers à l’appliquer, ils seront à même de montrer comment faire aux habitants. Cela les valorisera dans leur rôle, et sera un puissant moteur de transformation de leur métier et de motivation dans leur travail.
Les avantages de cette interdiction
Outre le gain financier pour la collectivité, cette gestion domestique des déchets verts présente de nombreux avantages.
En effet, enlever les déchets verts de vos déchetterie permet de gagner de la place. Selon les déchetteries, cela vous ferait gagner de 1 à 2 quais, de quoi permettre une meilleure organisation de la collecte pour les autres déchets. Par ailleurs, cela réduira considérablement la circulation dans l’enceinte, améliorant ainsi le confort des usagers, qui passeront moins de temps à attendre, moteur allumé, leur tour.
Par ailleurs, pour diminuer l’empreinte carbone de votre collectivité, cette solution est idéale. Les études de l’Ademe montrent que la gestion de proximité des déchets verts génère moins de co2 que ses alternatives et permet d’en capter plus. C’est la solution la plus efficace pour gérer ses déchets en vue d’une stratégie bas carbone.
Enfin, vous y gagnez une matière première bon marché pour amender les champs et ainsi contribuer à la mise en oeuvre d’une résilience alimentaire locale.
Conclusion
Nous avons ainsi vu pourquoi et comment gérer les déchets verts ailleurs qu’en déchetterie. Les réutiliser directement chez soi permet d’éviter un gaspillage d’argent, de matière première et d’énergie tant pour la commune que pour les habitants. Cela pourrait même permettre de créer des emplois dans votre commune et ainsi de renforcer les aspects positifs de la transition écologique locale.
On peut aussi déposer les tailles de haies SOUS LES HAIES : plusieurs avantages : on gagne du temps (pas de broyage), on crée des refuges pour de petits animaux, on nourrit les haies, on garde un stock de bâtons si on en a besoin pour la suite (tuteurs en noisetiers par exemple).
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