20 idées pour rendre votre école plus verte
Victor Hugo écrivait que « Les maîtres d’écoles sont des jardiniers en intelligences humaines« . Cette phrase ne saurait être plus vraie à l’heure actuelle. En effet, le rôle de l’école n’est plus de former des soldats ou des ouvriers pour servir les intérêts capitalistes, mais bien de former des individus conscients de leurs responsabilités vis-à-vis de la planète. Pour y parvenir, nous avons besoin de créer une école plus verte. Une école capable, par son exemplarité, ses enseignements et ses habitudes, de former les citoyens qui porteront le poids de nos erreurs climatiques passées. Des citoyens qui se battront pour corriger ces erreurs. Cet article permet de montrer le rôle décisif des communes dans ce processus.
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Les pouvoirs scolaires des collectivités
La gestion des établissements scolaire est partagée entre plusieurs collectivités. Le ministère de l’éducation nationale a le monopole sur le contenu pédagogique. C’est aussi lui qui rémunère les enseignants, y compris pour les écoles privées sous contrat. Quant aux collectivités locales, elles gèrent le foncier des établissements scolaires publics. La commune s’occupe des écoles primaires, le département des collèges et la région des lycées.
A ce titre, il leur revient de construire, entretenir et rénover les bâtiments et équipements scolaires. Ils mobilisent à cet effet leurs compétences en voirie et en aménagement du territoire. Ce sont aussi eux qui recrutent et rémunèrent les agents techniques (entretien, cantine), les ATSEM et animateurs périscolaires. En outre, la commune a l’exclusivité de la gestion de la caisse des écoles. Le lien avec les associations locales, notamment sportives, s’avère également décisif pour amorcer la transition vers une école verte.
C’est donc à la commune que revient la plus lourde charge en la matière. Avec les crèches, lieu d’accueil périscolaire, écoles maternelles et élémentaire, sa compétence scolaire est énorme. C’est d’autant plus crucial dans le cadre de l’éducation à l’environnement, que c’est à cet âge là que s’apprennent les bons réflexes. Un enfant qui grandit et apprend dans une école verte sera certainement mieux disposé à devenir un véritable écocitoyen. Et à travers l’enfant, ce sont aussi les parents qui sont touchés.
L’aménagement de l’école verte
Parmi les actions possibles des collectivités locales pour rendre l’école plus verte, je vous propose de distinguer d’abord celle relevant de l’investissement. Ce sont en effet des changement plus pérennes avec un effet durable sur votre commune. A ce titre, ils sont à privilégier, car ils seront source d’apprentissage, d’exemplarité et pourront inspirer d’autres collectivités.
Des écoles énergétiquement performantes
La convention citoyenne pour le climat a rappelé la nécessité d’une rénovation énergétique performante pour diminuer nos émissions de GES. Les écoles représentent 20% des surfaces chauffées des bâtiments tertiaires. Le chauffage représente 47% de la consommation électrique du tertiaire, 55% avec la climatisation. Ces problèmes d’isolation, outre l’inconfort qu’ils génèrent chez les usagers des écoles, sont aussi un fardeau financier et environnemental pour les collectivités.
L’observatoire des finances publiques estime ainsi le coût médian du chauffage et de l’électricité à environ 90€ par élève par an. C’est le poste le plus important après celui du personnel.
Ce besoin de rénovation va devenir de plus en plus pressant. L’augmentation des chaleurs moyenne ne va pas aller en s’arrangeant. Certes les hivers deviennent moins rudes, mais restent exposés à des pics de froid. C’est d’autant plus important que, comme nous l’évoquerons plus tard, les écoles pourraient être mutualisés avec d’autres usages. Leur rénovation facilitera ainsi leur polyvalence. En la matière, l’isolation par l’extérieur et par les toits est un moyen rapide et efficace d’améliorer les performances du bâti.
Le modèle standard des écoles en béton brut et grandes baies vitrées est à bout de souffle. Ce modèle n’est pas adaptée aux fortes chaleurs et est susceptible d’aggraver les pics de chaleur. De ce fait, il pose aussi des questions de santé publique. La climatisation naturelle des équipements scolaire pourra reposer sur des mesures annexes. Jouer sur l’albedo avec des peintures claires permettra d’éviter l’accumulation de chaleur. Végétaliser les murs et toits sera une autre source de refroidissement et d’isolation.
L’isolation des écoles est ainsi un moyen facile pour les collectivités de diminuer leur empreinte carbone et de maitriser leurs dépenses. Ce sont des économies qui font partie du plan global de transition écologique de la commune.
Des cours végétalisées
La rénovation énergétique des écoles va de pair avec le réaménagement des cours d’école. Ces cours, outre leur impact environnemental, sont un enjeu de partage de l’espace selon le genre. En effet, les travaux pionniers de la géographe Edith Maruéjouls souligne le partage inégal de la cour de récréation entre filles et garçons. La cour est centrée autour des sports collectifs masculins, les activités féminines étant repoussées à la marge. C’est un début de conditionnement entre des activités compétitives et valorisantes, dites viriles, et d’autres plus coopératives et discrètes, qui ne le seraient pas.
Cette question est primordiale, l’oppression patriarcale étant un risque clairement identifié de la transition écologique.
L’intérêt de transformer la cour d’école est donc non seulement d’améliorer l’égalité entre les sexes, mais aussi d’en faire des oasis de verdure. En effet, des école donnant de la place à la nature seront plus efficaces que des écoles entièrement bétonnées. La préservation des espaces naturels est un moyen efficace et financièrement raisonnable de lutter contre le changement climatique. Il s’agit de créer une école verte dans son esprit et dans sa forme.
Le Cerema a ainsi conçu une méthodologie de conception de telles cours végétalisées. Il recommande entre autres d’installer un revêtement poreux, un coin de verdure consacré à un potager ainsi qu’un ombrage végétal. Des arbres plantés dans un sol de pleine terre auront de ce fait un pouvoir rafraichissant fort pour l’école, et protègeront aussi les élèves de la pollution environnante. Par ailleurs, ces espaces végétalisés s’inscriront parfaitement dans la stratégie de préservation des trames naturelles, et pourraient s’inscrire dans le cadre de projets pédagogiques.
Repenser l’accès aux bâtiments
Le trajet entre le domicile et l’école est une problématique de mieux en mieux prise en compte. Si le trajet en lui même pose problème, le moment de la dépose présente aussi d’autres enjeux. D’une part trop d’enfants sont conduits en voiture sur des distances très faibles, ce qui suscite des émissions carbones inconsidérées. Ainsi, 7 enfants sur 10 seraient amenés à l’école en voiture, alors qu’ils habitent à moins de 1500m de leur établissement. D’autre part les parents encombrent les trottoirs, se garent sur les pistes cyclables et passages piétons et ralentissent la circulation.
Certaines mairies ont choisi de lutter contre les automobiles devant les écoles. Par exemple, à Haguenau, les rues où se situent les écoles sont interdites à la circulation aux heures d’entrée et de sortie. Grâce à une borne rétractable, les voitures ne peuvent plus du tout passer. Il n’y a même pas besoin de la police municipale pour faire respecter l’interdiction. Néanmoins, ce n’est pas possible partout et des reports peuvent se constater aux abords de la rue.
Une meilleure solution, pour les écoles urbaines, serait de promouvoir l’usage du vélo par les enfants. Ils pourraient ainsi se perfectionner à la pratique du vélo en ville, ainsi qu’à son entretien. C’est d’ailleurs devenu obligatoire en France depuis 2018. En installant un abri vélo sécurisé à l’entrée de l’école, en facilitant l’entretien des cycles, et en aménageant la voirie pour le vélo, la commune peut influer considérablement là-dessus.
La solution du vélo n’est évidemment pas une panacée. Sur les longues distances, pour les enfants trop jeunes ou handicapés, par mauvais temps, il faut des alternatives. La mairie ne peut pas imposer le ramassage scolaire en bus, seulement le proposer. Mais créer des lignes régulières, pratiques et sécurisées est un bon moyen de réduire déjà les trajets scolaires en voiture. Il s’agit avant tout de rendre la solution automobile moins pratique tout en proposant des alternatives crédibles, et de les valoriser pour leurs bénéfices environnementaux et sanitaires.
Améliorer la qualité de l’air intérieur
La qualité de l’air intérieur est un angle mort longtemps ignoré des politiques sanitaires. Heureusement, son contrôle est devenu obligatoire dans les écoles depuis 2018. Cette obligation s’appuie sur des organismes agrées ainsi qu’un guide des bonnes pratiques.
C’est une question d’autant plus critique qu’elle va de pair avec celle de la rénovation énergétique. La meilleure isolation des bâtiments conduit ainsi à une moindre circulation de l’air. Les écoles rénovées doivent ainsi prévoir des dispositifs mécaniques, comme des VMC, de circulation de l’air, sans pour autant diminuer la performance énergétique. Le mobilier a aussi un effet considérable. En fonction du fabricant, les plastiques et bois seront plus ou moins émetteurs de polluants et particules. La labellisation environnementale est en la matière non seulement signe de la protection des gisements, mais aussi du moindre usage de produits dangereux.
Le personnel technique des écoles s’avérera par ailleurs décisif dans l’amélioration de la qualité de l’air. En matière d’entretien des locaux, il faut ainsi changer les habitudes et utiliser des produits plus respectueux de l’environnement. Cela passe aussi par le choix des matériaux utilisés pour l’entretien des bâtiments, notamment les peintures. L’ademe dispose également de fiches techniques pouvant expliquer les démarches à adopter.
Des pratiques sportives adaptées
Le sujet du sport est épineux. S’il apparait de plus en plus clairement que le sport de haut niveau est un non-sens écologique, cette prise de conscience locale tarde à venir. Les équipements sportifs sont des gros consommateurs d’espace et de ressources naturelles. Les stades et les salles artificialisent 6% des terres à eux seuls, quand les piscines gaspillent massivement énergie et eau.
La question de renoncer à certaines pratiques sportives pourraient se poser mais ne sera pas tranchée ici. Ce sera un débat à avoir avec la population, ne serait ce que par rapport à leur coût pour la collectivité.
Des changements peuvent notamment avoir lieu dans la pratique des sports. Au niveau du matériel, la piste des recycleries sportive peut être envisagée. Les fédérations et clubs renouvellent fréquemment leur matériel, ce peut être l’occasion d’équiper votre école à moindre coût.
Il est clair en tout cas que certaines pratiques sportives s’inscrivent idéalement dans la démarche de transition écologique. La pratique du vélo en est un exemple évident. Donner le goût du vélo très tôt, outre les avantages pour venir à l’école évoqué plus tôt, permettront de faire reculer la part modale de la voiture chez les jeunes devenus adulte. D’une certaine manière, les activités manuelles comme le jardinage pourraient presque être considérées comme un sport. L’important n’est peut être pas l’esprit de compétition, mais bien plutôt la coopération entre les élèves.
Enfin, la mobilité dans les compétitions sportives scolaires est un autre enjeu. Celle-ci pèse directement dans le bilan carbone des établissements. Les compétitions lointaines doivent elles être maintenues ? Là encore, c’est un débat à tenir au sein des établissements.
Transformer les sanitaires
Cette partie peut sembler anecdotique et pourtant s’inscrit dans le cadre d’un processus de réflexion global des pratiques. Les sanitaires scolaires posent ainsi question au niveau de la gestion de l’eau et des déchets.
Les sanitaires scolaires, surtout les plus anciens, sont ainsi sans mitigeurs. L’eau coule sans qu’il soit possible de l’arrêter. Ce choix est aussi d’ordre sanitaire, puisqu’il limite le contact avec les robinets. Néanmoins, l’eau représente une charge annuelle médiane pour les communes d’environ 17€ par élève. L’installation d’un mousseur, un petit dispositif de quelques euros pièce, permet ainsi de réduire le débit de quasiment 50%. C’est une source d’économie facile. Des animations peuvent d’ailleurs être prévues pour sensibiliser les élèves à cette question, y compris à la maison.
Mais le véritable changement doit venir des toilettes. Il ne s’agit pas de se contenter de mettre des briques dans la chasse d’eau ou de prévoir deux boutons selon les besoin. Je propose de carrément mettre en place des toilettes sèches à l’école. Ainsi que je l’expliquais dans un précédent article, il y a beaucoup de préjugés sur ce dispositif. Grâce à des cuves de lombricompostage installées en sous-sol, les WC ne sont pas sales, ne dégagent pas d’odeur et ne mettent pas élèves en contact avec les lombrics. Vous pourriez même essayer de séparer l’urine des matière fécales pour plus d’efficacité.
Ces dispositifs demandent en réalité moins d’entretien que les sanitaires classiques et ont un double avantage. D’une part, fini la consommation d’eau de la chasse d’eau. D’autre part, le compost ainsi produit pourra servir à entretenir les espaces verts précédemment aménagés. Sur le sujet, une animation sur la vie des sols et les besoins en azote et phosphore, produits trouvés en abondance dans l’urine et la matière fécale, pourraient être pertinente. Une école verte serait ainsi une école qui s’inscrit pleinement dans l’économie circulaire à son échelle.
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Eduquer au respect de l’environnement
Les collectivités locales n’ont aucune influence directe sur le contenu pédagogique de l’enseignement. Les professeurs dispensent les cours selon les directives des académies, pas des élus locaux. Cela ne signifie pas pour autant que les collectivités sont impuissantes en matière d’éducation. Plusieurs outils s’offrent à elles pour créer une école verte, ouverte à la transition écologique, malgré la mauvaise volonté du ministère.
Intégrer l’environnement dans le projet éducatif de territoire
Depuis quelques années, une démarche de contractualisation s’est instaurée entre communes, services de l’état et partenaires institutionnels. A travers le projet éducatif de territoire, les communes ont dès lors un rôle à jouer dans l’éducation des enfants.
Si, initialement, il s’agit plus de coordonner les activités périscolaires et extrascolaires – gérées par la commune – ce projet peut aller plus loin. En effet, justement grâce aux activités péri- et extrascolaires, la commune peut proposer des activités qui feraient sens si elles étaient reprises dans le cadre pédagogique.
Vous pourriez par exemple imaginer différents ateliers permettant d’initier les enfants à la résilience. En la matière, les sujets ne manquent pas. Si votre commune gère un potager municipal, notamment pour alimenter la cantine scolaire, les enfants pourraient participer à son entretien pour découvrir le jardinage. Ce sera également l’occasion de découvrir le compostage pour le développer à la maison. Les activité de réparation, comme la couture ou l’électronique, pourraient convenir également.
En affichant ainsi ses ambitions environnementales, la commune permet aux autres acteurs de s’aligner et de s’harmoniser. Les cours de science pourraient devenir complémentaires de ce qui est ainsi appris dans les potagers.
Proposer des animations réalisées par les services municipaux et associations locales
Il est devenu courant de voir des animateurs intervenir dans les classes grâce au soutien des collectivités locales. Par exemple, les intercommunalités peuvent proposer des animations liées à la gestion des déchets dans le cadre de leur compétence environnementale.
Pour autant, là encore, cela dépend de la bonne volonté des professeurs. Ils ne sont pas obligés d’accepter les animations que vous leur proposez. D’expérience, ce sont plutôt des choses assez demandées, mais la commune ne peut rien imposer.
Comme je l’explique plus bas dans le cadre d’un accompagnement global, il y a de bonnes animations à proposer pour motiver enseignants et élèves en même temps. L’association avenir climatique propose ainsi des animations conçues comme des séquences pédagogiques, disponibles également sans animateurs. De la sorte, les enjeux climatiques sont expliqués aux enfants comme dans un cours. Mais de manière générale, les CPIE et assimilés seront les interlocuteurs privilégiés pour intervenir en classe au sujet de l’environnement et de la découverte de la nature.
Enfin, même sans faire appel à un prestataire extérieur, pensez au personnel scolaire. Les ATSEM par exemple pourraient être formé-e-s à des animations sur la protection de l’environnement. Ce sera valorisant pour eux, leur mission seront diversifiées et ces agents sont déjà au contact des enfants.
Soutenir les classes vertes
La classe verte est une solution idéale pour sensibiliser concrètement les enfants aux enjeux environnementaux. Permettant à une classe de découvrir la nature par un séjour à la campagne, elle offre une expérience empirique qui peut manquer aux enfants citadins. Evidemment, pour les ruraux, cela peut se décliner aussi en classe de mer ou de montagne, il y a là aussi des choses à dire le cas échéant. Dans tous les cas, privilégiez les transports en commun à l’impact le plus faible.
Dans votre démarche pour une école verte, ce séjour montre aux enfants ce pour quoi ils s’engagent vraiment. Voir des films, faire des jeux, écouter des animations, c’est très bien. Se balader dans une forêt, pister ses habitants, visiter une ferme, comprendre la vie des sols de visu, ce sont des apprentissages bien plus marquants. La classe verte, d’une certaine manière, participe à la pédagogie active dont les bienfaits sont reconnus.
Cela pourra d’ailleurs être le coeur du projet éducatif dont nous parlions plus haut, ou d’une démarche de transition de votre école verte. C’est à ce moment là que les enfants pourraient réaliser des projets personnels. Les possibilités pédagogiques de ce genre de séjour ne manquent pas.
Pourtant, la classe verte représente quand même un enjeu financier important. S’il est possible d’en faire porter une partie du coût par les parents, la commune devra néanmoins prendre sa part. Or, dans un souci d’égalité sociale, la caisse des écoles devra être mise à contribution pour permettre à tous d’y accéder. Dans les communes plus grandes, il devient donc plus compliqué de généraliser un tel modèle à toutes les écoles. Eventuellement, il arrive que des conseils départementaux les soutiennent dans le cadre de leur programme d’éducation à l’environnement.
Profiter des vacances scolaires
Les vacances sont une occasion idéale pour proposer aux élèves d’aller plus loin dans leur réflexion environnementale. C’est d’autant plus facile que cette fois, c’est la commune qui décide du contenu des activités.
Sur la durée d’une semaine, les enfants peuvent ainsi participer à des ateliers plus longs pour approfondir ce qu’ils voient en classe.
Par exemple, des associations jeunesse organisent des ateliers de simulation climatique. (le réseau des petits débrouillards par exemple. C’est l’occasion de découvrir la complexité des sommets climat, de comprendre les points d’achoppement entre pays. Faut il répartir le budget carbone selon la population, la richesse ou les émissions passées ? Qui doit payer les efforts de lutte ? Des questions difficiles qui sont au coeur de la compréhension d’une conscience écocitoyenne.
Mais pour avoir une vision plus pragmatique, ils peuvent aussi participer à la transition de la commune. Ces vacances peuvent être consacrées à découvrir le fonctionnement de leur commune, les services municipaux, les besoins de la population, pour réfléchir à la manière d’améliorer les choses. Ce serait comme un conseil municipal des jeunes dédié à l’environnement. Et justement, la convention citoyenne pour le climat est un autre format qui se déclinerait bien chez les jeunes. Sur quelques jours, ils pourraient découvrir les grands enjeux et reproduire la version pour adultes.
Ces ateliers sont autant d’occasion pour les enfants d’approfondir le travail fait en classe, mais aussi de développer de nouvelles compétences : rhétorique, esprit de synthèse, intelligence collective, prospective, travail d’équipe. Des atouts indéniables pour les élèves d’une école verte.
Enseigner la sobriété numérique
Au sein des activités périscolaires, ou même dans les activités scolaires, votre commune pourrait proposer des activités sur le numérique. Qu’on le regrette ou qu’on s’en réjouisse, le numérique est devenu une part prépondérante de la vie quotidienne. Il faut donc accompagner les jeunes générations pour les aider à avoir un impact réduit en la matière.
Le poncif de la suppression systématique des mails est ainsi largement répété comme écogeste numérique numéro 1. Il y a pourtant plus efficace, mais moins confortable. L’usage d’un smartphone avec les données mobiles est un problème bien plus important. Le streaming représente aussi une source considérable d’émission carbone. D’après the shift project, regarder 1h de streaming (youtube, netflix ou autre) revient à émettre 50kg de co2 par an. Ce sont à chaque fois des petites sommes qui s’accumulent jusqu’à représenter un impact quasi équivalent à un régime alimentaire carné.
L’achat fréquent de matériel neuf est un cas assez grave. En France, les téléphones sont renouvelés en moyenne tous les 2 ans. Dans 88% des cas, il fonctionne encore. Faire prendre conscience de ces impacts et inculquer des bons gestes pourrait relever d’une démarche pédagogique. Les enfants n’ont pas conscience de l’infrastructure matérielle derrière le numérique. Tous les datacenters, les câbles, les usines d’assemblage, les mines d’extraction de terre rare sont rarement exposés. Ce sera l’occasion de rappeler ce genre d’évidences.
D’ailleurs, pour équiper une salle informatique, les collectivités pourraient donner l’exemple en faisant appel à des ordinateurs d’occasion. Après un passage vers linux, la plupart des ordinateurs, même âgés, et pour peu qu’ils n’aient pas de problème grave, peuvent encore fonctionner des années et offrir des fonctions bureautique suffisantes pour l’enseignement.
Créer une bibliothèque de la transition
La conscience des enfants évolue à travers l’enseignement des professeurs, mais aussi à travers ce qu’ils lisent et regardent par eux même. Et pour faciliter cela, vous pourriez créer un fonds documentaire lié à la transition écologique à destination des enfants.
De nombreux éditeurs jeunesse se sont lancés sur le marché et proposent des contenus adaptés aux enfants, qui simplifient la question du changement climatique, de ses causes, conséquences et réactions nécessaires. Ce matériel, qu’il s’agisse de livres, de films ou d’autres médias, sera ainsi utile pour les travaux scolaires qui pourront être entrepris sur le sujet.
Cet aspect est d’autant plus important qu’ils en entendent de plus en plus parler dans les discussions et dans les médias. L’approche par les livres et la fiction peut ainsi servir de porte d’entrée pour les animations proposées précédemment. En s’identifiant à des héros de leur âge, les enfants découvrent le sujet autrement, se posent des questions et en discutent en classe avec leurs professeurs.
La démarche pourrait même être poussée plus loin via la réalisation de supports documentaires, type journaux ou vidéos, par les enfants eux-même. Ainsi, ils pourraient retranscrire ce qu’ils ont appris, ce qu’ils ont accompli dans le cadre de leur projet annuel, et le transmettre aux classes d’après.
Accompagner vers une démarche globale
Outre l’investissement et l’accompagnement éducatif, les collectivités locales peuvent aussi intervenir à travers les frais de fonctionnement des écoles. Ces dernières idées concernent ainsi des actions d’échelle plus petite, mais dont les effets ne sont pour autant pas à négliger. En effet, c’est le travers constaté par exemple dans la rénovation urbaine où, faute d’accompagnement suffisant, la rénovation n’est pas comprise par les habitants. Ces petites actions permettent ainsi de donner du sens à la démarche globale et de réinscrire les usagers dans son fonctionnement.
Réaliser le bilan carbone de l’école
Connaitre ses émissions carbone est un préalable indispensable à toute transition écologique dans une école. Il s’agit d’identifier les points qui créent un véritable impact écologique négatif dans leur usage. Nous en parlions d’ailleurs déjà dans un précédent article.
Dans le cas de l’école, deux sources d’émissions sont assez facile à identifier. D’une part il y a les dépenses d’énergie pour le chauffage, la climatisation et l’équipement électrique du bâtiment. Ce point a été évoqué comme prioritaire, d’autant qu’il est source d’économies pour la collectivité locale. D’autre part, le moyen de locomotion des élèves et enseignant est lui aussi déterminant. En tant qu’usager ou producteur du service rendu (le savoir), la manière dont ils se rendent à l’école est comptée dans le scope 3. Une école de grande ville n’a dès lors pas le même impact qu’une école rurale.
D’autres sources d’émissions sont à trouver dans les cantines de l’école. Origine des produits, méthode de culture, quantité d’emballage, gaspillage alimentaire et gestion des déchets sont autant de facteurs, parmi d’autres, déterminants en la matière. Pour le coup, il peut être plus facile de les résoudre, à moins que la restauration ne soit assurée par un prestataire privé.
Pour vous aider dans le bilan carbone, des outils existent. L’association avenir climatique a ainsi mis au point le bilan carbone campus, qui permet d’impliquer les élèves dans cette démarche. C’est pédagogique, ludique et vraiment bien fait.
Obtenir un label pour son école verte
Si vous souhaitez inscrire votre démarche dans le cadre d’un label garantissant vos efforts, il existe deux solutions. Cela vous permettra d’obtenir une reconnaissance du chemin parcouru, une visibilité auprès des autres établissements. Par ailleurs, le bilan vous donnera l’occasion de savoir comment vous améliorer encore plus.
D’une part la fondation Teragir coordonne en France le label eco ecole, déclinaison du label international eco-schools. Il s’agit d’une démarche globale basée sur 8 thématiques différentes, mais qui ne sont pas à aborder simultanément. Ces thèmes permettent d’engager enfants et personnels autour d’un projet commun de transition. Des fiches pratiques permettent ensuite d’aller de plus en plus loin. Des associations et collectivités locales sont également formées pour accompagner les établissements volontaires et les aider, leur fournir des ressources, répondre à leurs doutes et hésitations.
D’autre le ministère de l’éducation nationale porte le label établissement en démarche de développement durable (E3D). Le label est plus axé sur les objectifs de développement durable, qui sont au coeur des objectifs poursuivis. Il n’y a par ailleurs pas d’accompagnement vraiment prévu, sinon par l’académie même. La labellisation se fait en 3 niveaux qui saluent la progression de l’établissement.
Les deux labellisations sont complémentaires et pas du tout opposées. Dans la pratique, éco-école est plus exigeant – mais offre plus d’aide – que son équivalent officiel. Dans tous les cas, la démarche est néanmoins gratuite pour les établissements et convient pour accompagner le chemin vers une école verte.
Fournir la cantine en produits de qualité
La restauration collective est un axe d’amélioration évident de votre établissement scolaire. Si elle est gérée par un prestataire, c’est dans les clauses techniques du marché public que cela se joue. Si elle est en régie, c’est donc la commune qui change ça directement, mais ce n’est pas forcément plus simple.
Les choses changent énormément en la matière ces dernières années. Mais sur le plan strictement climatique de la réduction du bilan carbone, seul le type d’aliment à un impact. Le transport, l’emballage, la manière de produire, la transformation ont un impact carbone relativement faible. D’un point de vue plus large, ces autres facteurs jouent aussi évidemment dans la protection environnementale.
Une école verte est donc une école dont la cantine est essentiellement végétarienne. Même une viande locale, dans une ferme bio, sera climatiquement pire que des légumes surgelés qui ont poussé sous serre chauffée à l’autre bout du monde. Le choix d’une production locale relève d’une logique de résilience alimentaire. Ce en quoi nous encourageons vivement les communes évidemment.
La lutte contre le gaspillage alimentaire est une autre source considérable de réduction du bilan carbone. Cela passe par un réaménagement de la cantine, ainsi que de nouvelles pratiques dans le service : pain servi tranché, dessert pris quand le plat est fini, entrée et dessert présenté en vrac, etc. C’est aussi une source d’économie pour la collectivité, ce qui permet d’acheter de meilleurs produits sans monter les prix.
Interdire les goûters transformés
Le goûter représente à la fois un enjeu sanitaire et environnemental. J’ai moi même pu constater lors d’interventions dans les écoles que la plupart des enfants avaient des goûters transformés.
Ils pourraient être interdits sur proposition du maire à la direction de l’école. A la place, les enfants ramènent des fruits ou des biscuits en vrac. L’important est de leur faire comprendre l’impact des déchets plastique sur l’environnement, ce que le service environnement peut réaliser à travers une animation dédiée. Dans un second temps, un travail sur le sucre et les qualités nutritionnelles comparées des fruits et produits transformés pourraient être réalisés. Ca ne rentre pas vraiment dans le bilan carbone de l’établissement, mais ces produits jouent clairement sur l’empreinte carbone individuelle, et c’est l’occasion de l’inculquer à des enfants qui vont connaitre une baisse de 75% de leur empreinte écologique au cours de leur existence.
Une autre dérive constatée est celle des petits déjeuners fournis par la commune. Cette initiative part d’une bonne intention, et lutte efficacement contre la précarité alimentaire dans certains territoires. Malheureusement, c’est là encore l’occasion de voir des produits transformés (briquettes de chocolat, jus de fruit trop sucré, céréales transformées) distribués aux enfants, qui s’y habituent et y prennent goût. Une politique qui aboutit au résultat inverse de celui espéré en somme.
Alors qu’un enfant sur cinq est en surcharge pondérale en cm2, cette interdiction présenterait ainsi un atout sanitaire supplémentaire. Surtout si dans le même temps un effort qualitatif est porté sur la cantine.
Privilégier les fournitures scolaires durables
A travers la caisse des écoles, les communes ont la capacité de distribuer des fournitures scolaires aux élèves. Cela peut se faire avec une prise en charge complète ou partielle des frais, considérant que l’achat de fourniture en gros permet des économies d’échelle. de la sorte, les parents qui choisiront le matériel public auront une facture moins élevée à la rentrée.
Le collectif profs en transition propose une méthodologie pour se questionner, entre professeurs, élèves et parents, sur les besoins en matériel. D’autres se questionnent sur la pédagogie sans cartable, où le matériel reste en classe.
Privilégier une telle approche présente de nombreux avantages. Déjà, c’est une manière de résister à l’obsolescence programmée d’un matériel dépendant des tendances marketing. Ensuite, c’est un marqueur fort d’égalité sociale, puisque tous les élèves ont le même matériel et ne se distinguent donc plus. C’est presque comme le port de la blouse. Enfin, à travers son marché public, la commune peut privilégier du matériel solide, disposant de labels environnementaux et sociaux fiables.
Il serait même possible d’envisager carrément une bourse du matériel scolaire pour éviter qu’il ne soit jeté en fin d’année, comme cela se voit trop souvent.
Mettre en place un uniforme scolaire
C’est un sujet qui lui aussi peut être polémique. Il y a pourtant des vertus pédagogiques certaines dans la question de la tenue vestimentaire pour l’école. Tout comme les fournitures, la tenue est un marqueur social fort pouvant nuire à la mixité des élèves. L’hypersexualisation que l’on peut voir dans le secondaire est un autre souci qui peut être diminué par ce biais.
Mais surtout, c’est une occasion formidable de travailler sur l’impact de la mode sur la planète. L’ONG France Nature Environnement a ainsi calculé que nous achetons en moyenne 40 pièces textiles – soit environ 10kg – chaque année. Cela représente une empreinte carbone moyenne de 800kg de co2 ! Le sujet de l’uniforme pose donc aussi la question de comment s’habiller durablement.
A cet effet, elle propose des animations pour travailler le sujet en classe. Des tenues fabriquées localement, avec des matières locales (lin, chanvre) permettraient à la fois de structurer des filières locales vertueuses et de redynamiser l’économie, tout en baissant l’impact environnemental. A la suite de quoi les élèves devront travailler sur la question de la réparation de ces vêtements.
A l’occasion d’une kermesse de fin d’année, cela pourrait par exemple se concrétiser par une exposition de vêtements conçus par les enfants, un défilé de mode durable, un atelier de réparation, des stands pédagogiques sur la filière éco-textile ou la production locale de fibre textile, etc.
Transformer les kermesses en éco-manifestations
Les fêtes de fin d’année peuvent également être envisagées sous l’angle environnemental. Comme nous l’évoquions dans cet article, ce serait dommage de ne pas en profiter pour changer l’organisation.
Décoration issu du recyclage ou du réusage, matériel mutualisé, nourriture récupérée ou achetée en vrac/consigne sont autant d’éléments indispensables pour un événement avec un faible impact climatique. De la même manière, il faudra éviter la viande, les cadeaux inutiles et privilégier une mobilité durable.
Pour aller plus loin, ces kermesses et autres événements sont l’occasion de toucher directement les parents. Leur enfant leur aura certes déjà parlé de la manière dont son école s’est transformé. Mais là, c’est d’eux même qu’ils verront la transition écologique en action dans le cadre scolaire. C’est donc un moment privilégié pour mettre en place des animations qui peuvent directement toucher les parents et les amener à envisager les choses différemment.
Première année, parlez leur des déchets. Deuxième année, et si vous abordiez la question du textile (800kg de co2 par français chaque année). Et à la troisième kermesse, ce sera peut être le tour des usages numériques. Avec les 5 années de la primaire, il y a de quoi construire des cycles de transmission complet pour éduquer aussi les familles.
Intensifier les usages de l’école verte
Les écoles ne sont pas des bâtiments comme les autres. En ville, ce sont les bâtiments publics les plus répandus. Ils sont un centre de gravité de chaque quartier. Cela signifie que, normalement, vous avez une école à moins d’un kilomètre de chez vous.
Or, un établissement scolaire devenu école verte en suivant les préconisations de cet article a des caractéristiques particulières. C’est un lieu agréable en été comme en hiver, verdoyant, sain, facilement accessible. Les écoles sont de ce fait des lieux sociaux par excellence. Car dans une perspective de transition, il faut aussi envisager la multiplicité des usages d’un même lieu. Comme l’évoque Sylvain Grisot dans son manifeste pour un urbanisme circulaire, une cantine du Crous peut se transformer en espace de coworking le reste du temps.
La ville est pleine de ces espaces vides. Vides parfois, souvent ou tout le temps. Intensifions ses usages au lieu de l’étaler ! https://t.co/QpSh1tjHrs https://t.co/O8mWaAm2ux
— Sylvain Grisot (@SylvainGrisot) June 28, 2020
Dès lors, hors temps d’activité scolaire ou extrascolaire, qu’est-ce qui justifie qu’une école reste inutilisée ? En été, pendant les fortes chaleurs, les cours seraient des parcs idéaux pour les personnes en manque de fraicheur. Les weekends et en soirée, les salles pourraient servir à des activités associatives ou sportives. Et pourquoi ne pas envisager carrément d’en faire de véritables lieux de socialisation avec un bar, une piste de danse, etc.
Accomplir la transition écologique demande aussi de travailler sur la cohésion de la population. Faciliter l’émergence de nouveaux lieux de rencontre et de socialisation en fait partie, et ce serait dommage de construire des lieux dédiés, alors qu’il en existe déjà dans chaque quartier.
Conclusion
A travers cette vingtaine de propositions, vous pouvez découvrir un éventail complet d’actions que la commune peut proposer pour engager ses établissements scolaires vers une démarche plus vertueuse et en faire une école plus verte. Il s’agit en effet de travailler autant sur les aspects pédagogiques que logistiques, voire d’élargir sur des effets indirects. Tout n’est pas à réaliser en même temps, mais vous avez une idée de ce à quoi ressemblerait une école bas carbone.
Il y a probablement encore d’autres aspects à développer. Cet article se concentre essentiellement sur l’école élémentaire, mais dans le cas des crèches, nous pourrions parler des couches lavables par exemple. Je n’aborde pas non plus le cas des éco-délégués. Rendre une école plus verte est une démarche qui n’a quasiment pas de fin. Alors, quelles sont les actions que vous avez mise en place pour y parvenir ?